autodéterminations de l'Ecosse et de l'Irlande du nord après le Brexit

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Le 23 juin 2016, par un référendum indicatif les citoyens du Royaume-Uni, convoqués par l'ancien Premier Ministre britannique pour valider une démarche purement tacticienne à visée exclusivement intérieure, votaient avec une majorité de 51,89 % pour la sortie du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande-du-nord de l'Union européenne.

Nous ne reviendrons pas sur l'explication de ce vote désormais acquis – comme lors d'autres consultations référendaires en Europe, il existe un Brexit de droite (fondé sur la peur, le repli identitaire, la xénophobie, le rejet de l'immigration y compris intra-européenne, et aussi l'émergence d'un nouveau nationalisme « anglais) et un Brexit de gauche (fondé sur la dénonciation de politiques conduites tant au niveau européen et national qui débouchent sur la perte de puissance industrielle, des délocalisations, sur le manque de protections économique et sociale) ; il existe également un rejet des élites qu'à tort ou à raison les citoyens des différents pays membres de l'UE (et des démocraties occidentales en général) jugent oublieuses de la défense de l'intérêt général. Nous reviendrons pas sur des arguments faciles et infondés, comme celui qui consiste à expliquer que les électeurs âgés (votant très majoritairement pour la sortie de l'UE) auraient volé aux jeunes (votant très majoritairement pour le maintien dans l'UE) leur avenir européen ; en réalité, les jeunes citoyens britanniques ont très peu voté, ce qui explique qu'ils aient moins pesé dans les résultats.

Nous ne remettrons pas en cause non plus la légitimité du vote du parlement britannique pour valider l'activation de l'article 50 du TFUE après le référendum de juin 2016 : on a trop souvent dénoncé les manœuvres de contournement du vote populaire par les parlements comme facteur de crise de la démocratie, d'accroissement de la défiance entre les citoyens et leurs représentants, pour aujourd'hui dénoncer le fait que Westminster choisisse de respecter le vote des électeurs.

David Cameron et son gouvernement avaient choisi de consulter les Britanniques sur le maintien du Royaume-Uni dans l'Union européenne pour de mauvaises raisons : après un chantage évident auprès des institutions et des partenaires européens couronnés de succès, il pensait que le référendum du 23 juin lui permettrait de couper l'herbe sous le pied des europhobes du UKIP et de forcer ses opposants politiques (travaillistes, nationalistes écossais ou républicains irlandais) à faire campagne à ses côtés ; il a été pris à son propre piège.
Le vote sur le Brexit a mis en lumière les fragilités insoupçonnées du Royaume-Uni pour tous ceux qui n'y résident pas : l'Angleterre et le pays de Galles ont majoritairement voté pour la sortie de l'union européenne (53,4 % et 52,5 %), mais l’Écosse et l'Irlande-du-nord ont voté respectivement à 62 % et 55,8 % en faveur du maintien dans l'Union.

Or le Royaume-Uni n'est pas un État centralisé comme un autre ; il ne s'agit pas ici d'un vote italien ou français où des régions comme la Lombardie ou la Bretagne se distingueraient du reste de la nation. Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande-du-nord est composé de quatre Nations distinctes, qui bénéficient d'ailleurs d'importantes dévolutions depuis la fin des années 1990. Une telle distinction dans les votes entre l'Angleterre, cœur de la monarchie britannique, et des Nations reconnues comme telles et travaillées depuis longtemps par l'idée de l'indépendance nationale ne pouvait qu'atteindre l'intégrité institutionnelle du Royaume-Uni.

La sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne aura pour conséquence le rétablissement d'une frontière entre la République d'Irlande et la province d'Irlande-du-nord, alors même que le renforcement des coopérations et des circulations intra-irlandaises étaient un élément essentiel des accords de Paix du Good Friday, qui mirent fin à près de 30 ans de la plus longue guerre civile de l'Europe contemporaine (guerre civile elle-même conséquence d'un véritable régime d'apartheid imposé la minorité « irlandaise » et à l'intervention militaire britannique de 1969 qui se révéla rapidement favorable aux défenseurs de cet apartheid).
Les gouvernements britanniques et écossais s'étaient accordés pour que le référendum sur l'indépendance de l’Écosse, qui se solda le 18 septembre 2014 par un vote en faveur du maintien dans le Royaume-Uni à hauteur de 55 %, soit valable pour une génération mais à la condition expresse qu'aucune modification majeure du contexte n'intervint entre temps et que le gouvernement britannique avait promis aux électeurs écossais que le maintien de leur Nation dans le Royaume-Uni leur garantirait de rester dans l'Union Européenne.

Le gouvernement britannique s'était engagé auprès des parlements et gouvernements des nations du Royaume-Uni que la procédure de sortie de l'Union européenne ferait l'objet d'un accord préalable à l'activation de l'article 50 du TFUE. Or Madame Theresa May a annoncé que l'activation de l'article 50 serait effective le 29 mars 2017 et s'est totalement délesté de cet engagement, au risque de saper totalement la confiance entre ces parlements et Londres.
Enfin, le jeudi 2 mars 2017, les résultats des élections au parlement nord-irlandais de Stormont ont débouché sur une situation inédite : les partisans de la réunification (42 sièges) ou d'un rapprochement (8 sièges) avec la République d'Irlande, pour guérir définitivement ce pays des tensions communautaires, dépassent largement avec 50 sièges les différentes familles conservatrices unionistes (39 sièges) soutenant la couronne britannique. Or les accords du Good Friday impliquent les principaux partis participent au gouvernement local, plutôt que des majorités d'idées ou de projets ; un tel gouvernement paraît aujourd'hui est improbable au regard de l'alignement total du Democratic Unionist Party sur les tories britanniques concernant le Brexit et les soupçons de malversation financière à son égard. La situation est donc bloquée et dans un territoire qui a connu trois décennies de guerre civile, c'est une question angoissante.
Dans cette situation, les socialistes et les social-démocrates européens ne peuvent rester silencieux et indifférents. Leur première préoccupation doit être celle de la garantie de la Paix civile et du respect de la souveraineté populaire. C'est pourquoi nous ne nous pouvons pas attendre que la situation pourrisse du fait de l'autisme du gouvernement britannique actuel.

Nous considérons donc que les résultats du Brexit et les choix politiques opérés par la Première Ministre britannique depuis lors constituent une modification essentielle du contexte politique qui avait présidé au maintien de l’Écosse dans le Royaume-Uni ; nous considérons que les représentants écossais à Westminster et Holyrood sont parfaitement cohérents et légitimes pour porter les aspirations nationale et européenne du peuple écossais ; nous considérons que le gouvernement britannique ne peut ignorer plus longtemps le vote de la majorité des citoyens de deux Nations membres du Royaume-Uni lors de ce référendum.

Aussi nous prenons aujourd'hui officiellement et publiquement position pour qu'une nouvelle consultation soit organisée au plus tôt en Écosse sur l'appartenance de cette Nation au Royaume-Uni. Nous prenons aujourd'hui officiellement et publiquement position pour que l'Union Européenne – la Commission et le Conseil européens – garantisse à l’Écosse, si elle choisissait l'indépendance une adhésion rapide en son sein.
De même, nous prenons aujourd'hui officiellement et publiquement position pour que soit organisée dans moins de 5 ans un référendum sur l'unité irlandaise et que d'ici là soient très rapidement révisés les accords de Paix du Good Friday afin d'autoriser les parlementaires de Stormont à constituer un gouvernement local fondé sur des majorités de projet, plutôt que des majorités contraintes entre partis que tout opposent.

Les gouvernements conservateurs britanniques ont multiplié depuis 3 ans des mauvaises décisions pour des raisons bassement politiciennes ; pris à leur propre piège, ils ne semblent plus se préoccuper que des seuls intérêts de la classe dominante anglaise, contre tout à la fois ceux de la working class et des autres nations du Royaume-Uni. Il est donc temps que ceux qui sont méprisés par la locataire actuelle du 10th Downing Street puissent reprendre avec force la parole.

Mobilisation créée par Frédéric FARAVEL
4/4/2017

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